Le projet ITS3 vise à remplacer, lors du prochain arrêt long programmé (2026–2030) du LHC, les couches internes du détecteur de vertex (Inner Tracking System) de l’expérience ALICE au CERN. Ce nouvel ITS3 introduit une architecture révolutionnaire : les 432 petits capteurs montés sur support carbone seront remplacés par seulement 6 capteurs MAPS de très grande taille, autoportants et courbés en demi-cylindre. Ceci permettra de réduire au maximum la quantité de matière traversée par les particules tout en améliorant la précision de la trajectométrie.
Une innovation de rupture pour un défi technologique inédit
Pour relever le défi des contraintes mécaniques et électriques de la géométrie de ITS3, le CERN a développé en partenariat étroit avec l’IPHC un circuit imprimé flexible multicouches innovant. Il assure simultanément la distribution d’alimentation (2,5 A sur cinq lignes indépendantes), la transmission de signaux et de données à très haut débit (10,24 Gb/s) et la transition géométrique entre les cartes électroniques planes et les capteurs hémicylindriques. Une première mondiale à cette échelle en instrumentation de physique des particules. Ces travaux ont été présentés par Marc Imhoff (IPHC) et Antoine Junique (CERN) à la conférence TWEPP 2025 en octobre à Rethymno (Crète).
Le circuit multicouches développé par l’IPHC est constitué de trois sous-circuits flexibles laminés ensemble, garantissant stabilité mécanique, isolation électrique et uniformité d’impédance (100 Ω ± 5 %), validée par mesures TDR et VNA. Il permet également une conversion de pas entre l’univers millimétrique des cartes électroniques et l’univers micrométrique des capteurs silicium. La structure multicouches est assemblée et laminée sur un gabarit en aluminium, puis cuite à 200 °C en autoclave sous 8 bars pendant 12 h. L’ensemble du process a été pensé pour être compatible avec les techniques de fabrication industrielles.
Par ailleurs, les machines de micro-câblage sont traditionnellement conçues pour travailler avec des éléments plats tels que des circuits imprimés ou des connecteurs. Pour relier ces circuits imprimés flexibles aux capteurs MAPS « MOSAIX » incurvés, un outil motorisé et piloté en Python a donc été développé afin de réaliser un micro-câblage direct sur surface courbe — un saut technologique majeur qui repousse les limites des techniques d’interconnexion classiques.
Les essais électriques et thermomécaniques de ces circuits multicouches flexibles démontrent une excellente linéarité du signal jusqu’à 5 GHz et une robustesse remarquable des performances après flexion et cuisson. Cette innovation ouvre la voie de l’intégration instrumentale d’une nouvelle génération de détecteurs courbés, plus légers, plus rapides et plus compacts, pour la trajectométrie des particules dans les futurs accélérateurs du CERN.




