Dans les starting-blocks pour le redémarrage de BELLE-II

30 novembre 2023

Après un arrêt technique d’un an et demi, l’expérience Belle II, située à Tsukuba au Japon, est prête à reprendre des données. L’accélérateur SuperKEKB sera mis en route progressivement fin 2023 pour démarrer le run de physique début 2024.

Le site web de CNRS Nucléaire et Particules consacre une brève scientifique au redémarrage imminent de Belle II.

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Belle II observe les possibles premiers signes de transitions rares de quarks b → s ν anti-ν

L’analyse des données de la campagne 2019-2022 effectuée par le groupe strasbourgeois durant cet arrêt technique a révélé les signes de la désintégration du méson B →K+ ν anti-ν dans les collisions e+ e- produites par SuperKEKB à la plus haute luminosité jamais atteinte par un collisionneur de particules. Il s’agit du premier indice de la transition rare de quarks b → s ν anti-ν. L’annonce de ces résultats (https://arxiv.org/pdf/2311.14647.pdf), auxquels a significativement contribué l’équipe Belle2 de l’IPHC, a constitué un des points forts des grandes conférences internationales de l’été dans la discipline. C’est également l’objet de la thèse de Lucas Martel, encadrée par Giulio Dujany et Isabelle Ripp-Baudot, soutenue le 20/09/2023.

En savoir plus sur la désintégration du méson B →K+ ν anti-ν

Cette désintégration est prédite avec une grande précision par le modèle standard de la physique des particules, à un taux de l’ordre de 5e-6. Il s’agit donc d’une fréquence très faible, bien que généralement accessible à l’observation par les expériences actuelles dédiées à la physique des saveurs, Belle II et LHCb. La raison pour laquelle cette désintégration n’avait encore jamais été observée jusqu’à présent vient surtout de l’état final visible constitué d’un unique kaon, impossible à distinguer de la multitude de kaons semblables produits couramment dans les désintégrations des mésons beaux. Belle II offre des conditions expérimentales uniques permettant la recherche d’un état final de ce type constitué d’une grande partie invisible, notamment du fait de l’excellente connaissance de l’énergie et de l’impulsion totales de la collision des leptons, permettant de contraindre cinématiquement la partie invisible.

L’existence de cette désintégration était bien attendue, mais la surprise est venue de sa fréquence mesurée pour la première fois par Belle II. Elle est en effet plus élevée que prédit par le modèle standard, bien que la valeur mesurée puisse encore être considérée comme compatible avec la prédiction, à 3 écarts standards près. Ce résultat a suscité un grand intérêt dans la communauté et engendré déjà de nombreux articles théoriques spéculant sur son origine possible, notamment de la matière noire ou des leptoquarks liés à la grande unification des interactions fondamentales. Il est néanmoins encore trop tôt pour conclure quant à l’excès observé, et il peut aussi bien s’agir à ce stade d’un indice de nouvelle physique au-delà du modèle standard que d’une simple fluctuation statistique.

Il faudra attendre de nouvelles données de Belle II pour progresser sur le sujet. L’expérience Belle II a enregistré 428 fb-1 de données entre 2019 et 2022, et redémarrera le run de physique début 2024 après un arrêt technique de plus d’une année et demie. 

Vue du détecteur de vertex de BELLE-II, avant son insertion en 2023. Image : BELLE-II Collaboration